Auteurs : Ezaque Lopes Michelle Moore

Ces tendances généralement à la hausse sont marquées par des périodes de fluctuation, des troubles de croissance et de la réticence de la part des travailleurs. Néanmoins, la portée et l'ampleur de la transformation sont déjà évidentes et les organisations qui ignorent la tendance le font à leurs risques et périls. Dans cet environnement en évolution rapide, les dirigeants doivent adopter une approche à la fois réfléchie, proactive et axée sur les employés pour positionner leur organisation en vue de tirer leur épingle du jeu.
Faciliter le travail hybride et le télétravail
Les modèles de télétravail étaient déjà en train de se répandre bien avant que la COVID-19 ne provoque une brusque accélération de la tendance. Cinq ans après le début de la pandémie et plus de trois ans après que la plupart des gens ont pu retourner au bureau, la popularité du modèle est maintenant bien établie. Même le travail d'équipe peut se dérouler efficacement dans un cadre de travail éclaté, grâce à la disponibilité de la technologie qui favorise la collaboration. Un résultat notable du modèle est que le rythme de travail s'accélère, notamment par l'attente de réponses plus rapides aux messages des collègues, des clients et des partenaires d'affaires.
Même si certaines organisations ont tenté, avec plus ou moins de succès, d'exiger le retour au bureau, les employeurs et le personnel reconnaissent de plus en plus les avantages du télétravail, y compris l'augmentation de la productivité et une meilleure conciliation de la vie professionnelle et de la vie privée. Dans un même temps, il y a des inconvénients au télétravail, comme les occasions manquées d'interactions informelles et imprévues qui peuvent alimenter l'innovation, retenir les talents et aider à bâtir la cohésion de l'équipe.
Les organisations peuvent prendre des mesures pour améliorer les compromis entre le travail hybride et à distance et le travail au bureau. Le concept de l'environnement de travail axé uniquement sur les résultats mesure le rendement selon la qualité, la rapidité et l'efficacité des résultats du travail. Il convient particulièrement bien au télétravail et peut aussi aider les organisations à composer avec les différences intergénérationnelles dans les attentes du personnel. Les jeunes travailleurs de la génération Z, par exemple, sont plus susceptibles de s'attendre à un degré élevé d'autonomie pour décider quand, où et comment ils s'acquittent de leurs tâches.
Les chefs d'équipe peuvent également s'intéresser davantage au recours à la technologie pour combler les lacunes dans les interactions en conditions de télétravail, comme l'utilisation créative d'espaces de travail virtuels et d'avatars créés par les employés pour renforcer la cohésion de l'équipe. S'il est possible de se rencontrer en personne périodiquement, on peut investir ce temps de réunion sélectivement dans des conversations stratégiques qui peuvent renforcer les équipes tout en aidant à faire progresser l'organisation.
Promouvoir l'adoption des outils d'IAG
Le lancement public de ChatGPT en novembre 2022 a marqué le premier chapitre d'une transformation profonde de la façon de travailler. Depuis, les principales organisations technologiques se sont empressées de développer leurs propres plateformes de l'intelligence artificielle générative (l'IAG) et d'intégrer les capacités de cette technologie dans une vaste gamme d'applications existantes.
Cette situation inédite a confronté les dirigeants dans presque toutes les industries à la nécessité de comprendre les répercussions sur leurs organisations et d'élaborer des stratégies pour y faire face. Il n'est pas surprenant de constater qu'elle a également suscité des inquiétudes chez les travailleurs quant à de possibles pertes d'emplois, ainsi qu'un certain degré de déception et de frustration à l'égard de l'état actuel de l'IAG pour ceux qui l'ont déjà expérimentée dans leur milieu de travail. De plus, elle a créé des risques pour les organisations qui n'ont pas fourni au personnel des directives claires sur l'utilisation de ces outils.
Dans ce contexte, il est important de comprendre les approches très différentes que les organisations devraient adopter, entre la voie de la « grande T » et celle de la « petite T ». La « grande T » fait référence à l'utilisation stratégique de la technologie pour permettre des approches novatrices des fonctions opérationnelles essentielles telles que le service à la clientèle. La « petite T », quant à elle, correspond à l'utilisation individuelle de la technologie par les employés pour améliorer leur efficacité en matière de communication et de productivité personnelles.
La plupart des organisations n'ont pas d'autre choix que de se montrer proactives dans la recherche des pistes les plus prometteuses pour les initiatives de grande T et le déploiement de stratégies descendantes pour s'y engager. Ces stratégies supposent probablement une combinaison de recrutement, de nouveaux contrats ou de partenariat afin de se doter des ressources spécialisées nécessaires pour conceptualiser, concevoir, élaborer, mettre à l'essai et déployer les nouvelles solutions.
Une considération particulièrement importante pour l'application de la petite T est la nécessité de fournir aux travailleurs des conseils sur les limites nécessaires à l'utilisation de l'IAG afin d'éviter que des renseignements exclusifs ne soient exposés par inadvertance. Il faut aussi s'attaquer aux obstacles à l'adoption, dont l'appréhension face à l'IAG et la formation pour que le personnel tire le meilleur parti de cette technologie.
Les employeurs peuvent adopter de multiples stratégies pour s'aider à gérer les défis liés à l'approche petite T. Une d'entre elles consiste à créer un groupe d'utilisateurs précoces pour élaborer et mettre à l'essai des cas d'utilisation afin de communiquer leurs expériences et des pratiques exemplaires. Une autre consiste à trouver des façons de réduire l'appréhension et de donner un caractère ludique et agréable au processus d'adoption, par exemple au moyen de forums d'apprentissage volontaire. Les chefs d'équipe à tous les niveaux peuvent accélérer l'adoption générale par leurs pairs et les membres de l'équipe en recourant à la technologie et en parlant largement de leurs expériences et de leurs résultats à leurs collègues.
Maintenir l'équilibre tout en surfant sur la vague de l'innovation
L'innovation est rarement, voire jamais, un processus simple et linéaire. Il y a un risque important à prendre le virage trop tôt ou trop tard, lorsqu'un bouleversement fondamental est déjà en marche. Les utilisateurs précoces risquent de causer des perturbations internes excessives et d'investir dans des solutions infructueuses. Les utilisateurs tardifs risquent d'être gravement désavantagés par rapport aux concurrents qui ont déjà maîtrisé les nouvelles façons de travailler.
Pour ce qui est de l'adoption de technologies novatrices, les organisations ont tendance à suivre un cycle prévisible. Nombreuses sont celles qui s'empressent de les intégrer au cours de la phase initiale d'enthousiasme marquée par des attentes gonflées par un battage médiatique excessif. Ensuite, lorsqu'elles sont confrontées aux limites inévitables des premières versions imparfaites, la désillusion s'installe et elles font marche arrière1.
Les organisations se réinvestissent à des rythmes variés au fur et à mesure que la technologie mûrit et que les utilisateurs précoces en démontrent la valeur. Au fil du temps, la technologie devient largement intégrée en tant que catalyseur essentiel de la façon de travailler. Les employeurs peuvent obtenir un avantage concurrentiel en évitant à la fois les hauts et les bas du cycle d'engouement1.
S'adapter à de nouvelles façons de travailler
Il n'existe pas d'approche universelle pour déterminer où et comment les gens doivent travailler. Tout le monde ne sera pas aussi efficace en télétravail, pas plus qu'il ne sera aussi habile à intégrer des technologies comme l'IAG dans ses processus de travail. Même les personnes et les équipes qui ont une certaine expérience du travail à distance ou de l'adoption de technologies ont appris à choisir le moment et la façon de déployer ces approches et à faire preuve de créativité pour faire face aux inévitables compromis.
Les cadres supérieurs et intermédiaires doivent reconnaître ces différences et en gérer activement les répercussions aux niveaux du travailleur, de l'équipe et de l'organisation. Il est essentiel d'écouter régulièrement et activement les équipes en menant des sondages éclair et par d'autres moyens. Mais souvent, le plus grand défi consiste à traduire les enseignements en actions et à établir un lien clair avec les priorités de l'entreprise. L'analyse comparative d'organisations semblables, à l'intérieur et à l'extérieur de l'industrie, peut également fournir des données précieuses pour aider à cerner les domaines dans lesquels l'employeur est relativement en avance sur son temps, ou au contraire en train de se faire distancer. En fin de compte, toutefois, l'adaptation aidera les travailleurs et les organisations à demeurer concurrentiels dans le paysage en évolution du lieu de travail et de la façon de travailler.